Bien gérer son portefeuille, c’est aussi savoir maîtriser ses émotions. Cela se fait en prenant des risques mesurés et en comprenant bien les enjeux. Décryptage, la newsletter de PurePerf, vous aide chaque mois à analyser l’environnement économique et les forces qui animent les marchés. En toute humilité, nous partageons nos vues sur les risques et les opportunités à venir.

La citation du mois

“Se vogliamo che tutto rimanga com’è, bisogna che tutto cambi.”

“Il faut que tout change pour que rien ne change.”

Giuseppe Tomasi di Lampedusa (Le Guépard)

Rien ne sera plus comme avant

La récente investiture de Donald Trump nous offre l’occasion de commencer l’année par une réflexion :

Sous Biden, les actions ont grimpé, les obligations ont souffert, et le dollar s’est renforcé. Si l’on suit une logique simpliste, l’inverse pourrait se produire sous Trump :

  • Actions : pression à la baisse
  • Obligations : potentiel de reprise
  • Dollar : affaiblissement

Mais la réalité est plus complexe. Trump est imprévisible. Il casse des choses – parfois pour le meilleur, parfois pour le pire. Ce qui a fonctionné sous Biden pourrait ne plus fonctionner sous Trump.

Depuis l’élection, les marchés anticipent une hausse des droits de douane et du dollar. Mais comme en 2017, il est peu probable que l’impact réel soit aussi sévère que ce que certains imaginent.

Pourquoi ce focus sur les États-Unis ? 

C’est une question légitime pour nos lecteurs basés en France. L’économie européenne, malgré ses forces structurelles, reste en retrait par rapport aux dynamiques américaines.

Aujourd’hui, les États-Unis représentent 75 % de l’indice MSCI World, dominés par les géants de la tech (Magnificent Seven). Dans ce contexte, comprendre les dynamiques américaines est essentiel pour gérer un portefeuille diversifié.

Cela signifie-t-il que tout espoir est perdu pour l’Europe ? Absolument pas. L’Europe conserve des atouts significatifs :

  • Une économie réelle solide : la zone euro reste un marché de 450 millions de consommateurs solvables, avec une balance commerciale excédentaire de 150 milliards d’euros vis-à-vis des États-Unis.
  • Industrie compétitive : des secteurs comme l’énergie nucléaire française, les voitures allemandes, et même l’aéronautique européenne (Airbus) restent des leaders mondiaux.
  • Inflation maîtrisée : en comparaison avec les États-Unis, l’inflation dans la zone euro est sous contrôle, renforçant son attractivité économique.
  • Dette bien gérée : les émissions françaises continuent d’être largement sursouscrites, témoignant de la confiance des investisseurs.

Cependant, les États-Unis continuent à fixer le rythme des marchés mondiaux. Si leur économie continue de croître avec une inflation maîtrisée, cela profitera à tout le monde. Mais si les États-Unis ralentissent ou si le dollar chute, tous les marchés reculeront.

La situation actuelle rappelle celle du Japon à la fin des années 1980, lorsqu’il représentait 50 % de l’indice mondial. Tout semblait indestructible… jusqu’à ce que le cycle s’inverse. Cette concentration extrême sur les États-Unis et la tech américaine ne sera pas éternelle, mais pour l’instant, c’est là que tout se joue.

L’état de la dette : une bombe à retardement ?

Avec une dette représentant 125 % du PIB, les États-Unis dépassent la France (114 %), l’Allemagne (62 %) et même la Suisse (18 %). Les marchés obligataires restent sous pression, mais Scott Bessent, le nouveau secrétaire au Trésor, pourrait changer la donne. Ancien directeur des investissements chez Soros, il combine expertise macroéconomique et compréhension fine des marchés.

Même si Bessent n’a pas la tronçonneuse de Javier Milei, il pourrait amorcer des coupes budgétaires significatives, mettant fin à l’âge d’or des dépenses excessives. Si cela se concrétise, les taux longs américains reculeront cette année.

Pourquoi les marchés restent-ils complaisants ?

Malgré les incertitudes, les indicateurs de risque restent historiquement bas :

  • High yield américain : seulement 2,5 % de rendement additionnel par rapport aux emprunts d’État.
  • VIX (volatilité des actions) : sous le niveau de 15, illustrant un niveau d’aversion au risque très bas.
  • MOVE (volatilité des obligations) : inférieur à 85, contre 135 il y a deux mois.

Quatre raisons expliquent cette complaisance :

  1. Impact limité des mesures politiques : les décrets de Trump se concentrent pour l’instant sur des questions sociales et culturelles, avec peu d’effet économique direct.
  2. Excès de capital : avec des actifs financiers mondiaux représentant 6 fois le PIB mondial, et probablement 10 fois si l’on ajoute les dérivés, le non-coté et les hedge funds, l’excès de capital amortit les chocs économiques. À titre de comparaison, ce ratio était d’environ 3 fois au début des années 2000.
  3. Économie mondiale stable : une croissance modérée (2,5 %) et une inflation maîtrisée (autour de 2 %) sont attendues cette année. Rien de fou, mais rien d’alarmant non plus.
  4. Progrès technologiques rapides. L’intelligence artificielle stimule la productivité dans la plupart des industries. Cela soutient la croissance des bénéfices et les valorisations boursières.

Combien de temps cela peut-il durer ?

Malgré les incertitudes, le marché immobilier américain continue de surprendre par sa solidité :

  • Prix des logements (novembre 2024) : +3,4 % sur un an.
  • Ventes de logements existants : rythme annuel ajusté de 4,24 millions d’unités en décembre, le plus rapide depuis février 2024.
  • Offre de logements : pénurie persistante, avec un déficit estimé à 4,5 millions d’unités.

Ces chiffres témoignent d’une résilience étonnante, malgré des taux hypothécaires élevés.  Les taux hypothécaires à 30 ans s’élèvent à 6,96 %, après cinq semaines consécutives au-dessus de la barre des 7 %.

Pourtant, certains signaux suggèrent un changement à venir. Christopher Waller, gouverneur de la Fed, milite pour de nouvelles baisses de taux en 2025. A-t-il vu quelque chose que nous ne voyons pas ? De l’autre côté, Beth Hammack, présidente de la Fed de Cleveland, estime que l’inflation (à 2,9 %) reste trop élevée. Trump, quant à lui, pousse pour des baisses de taux immédiates. Allons-nous assister à une répétition de 2017-2018, où Trump critiquait sans cesse Jay Powell pour qu’il baisse les taux ? 

Cette incertitude reflète un contexte où personne ne sait vraiment à quoi ressemblera la politique monétaire dans les mois à venir. 

Dans l’histoire, il y a des périodes où la Fed donne des indications claires sur ce qu’elle va faire au cours des 6 à 12 prochains mois. Et puis il y a d’autres périodes où il n’y a vraiment aucune certitude, et où personne ne sait à quoi ressemblera la politique monétaire. C’est un peu là où nous sommes en ce moment.

Comment positionner son portefeuille

À ce stade, il est prudent de laisser l’administration Trump prendre ses marques. Le positionnement actuel du portefeuille PurePerf reste adapté : diversifié et prudent, il permet de capturer une partie de la hausse tout en limitant les risques.

L’euphorie des premières semaines de janvier commence déjà à s’estomper. Nous devrions terminer le mois dans le vert, ce qui nous convient parfaitement. Notre objectif reste une croissance régulière et robuste, sans chercher à être les plus performants chaque mois.

Conclusion

L’année du serpent s’annonce aussi excitante que complexe. Avec détermination et optimisme, nous sommes prêts à vous accompagner pour saisir les opportunités et relever les défis qui se présenteront.

Bien cordialement,

L’équipe PurePerf